Si nous devenons des voyageurs immobiles, quelles impressions du monde restera-t-il ?
La mémoire ne se nourrit pas d’exactitude, et on sait ce que l’odeur d’une madeleine peut recréer. Laissons la chaleur intense envahir le salon. Le cadre de la fenêtre délimite l’aplat d’une peinture bleu azur.
Chacun de mes pas fait crisser les aiguilles de pin, et je sens une odeur résinée monter du sol. Je m’assois sur cette chaise de jardin qui ressemble à celle que ma grand-mère sortait dans la rue pour aller bavarder les soirs d’été. On entend les notes musicales des gouttes d’eau dans le bassin, semblables à celles des tissus étranglés par les lavandières. Il fait frais. Des percées de lumière d’un blanc éblouissant, s’étendent au sol éclairant la place par endroit. Les larges feuilles des platanes protègent des rayons brûlants du soleil. Les façades des maisons sont peintes dans des déclinaisons de blancs, les toits en tuiles de terre cuite. En tendant l’oreille, on pourrait entendre des tintements de verres qui s’entrechoquent, le bourdonnement des discussions et les éclats de rire. Je plonge ma main dans l’eau. Aussitôt, l’image de l’abreuvoir en pierre qui était non loin de ma maison d’enfance surgit.
Ici, tout est vrai, tout est simple, il suffit de se laisser porter pour se croire ailleurs, dans le cœur d’un village, en Provence.
À hauteur d’assise, le bord de la fontaine adossée invite à s’asseoir et entamer une discussion au frais, profitant du doux parfum de lavande qui s’échappe de deux gargoulettes créées pour l’occasion.
Au-dessus,des cintres des tissus aux motifs graphiques sont suspendus à une grille en fer forgé. Un crochet permet aux visiteurs de tremper les tissus pour écouter le bruit des gouttes qui tombent dans l’eau.
A l’image des chaises que les villageois installent devant leur maison pour bavarder avec leur voisin, une série de chaises de jardin hétéroclites est peinte en bleu profond.
Le sol est recouvert d’aiguilles de pin, de feuilles de lauriers et de gravier blanc pour créer des percées de lumière. Cette combinaison de matériaux produit un parfum provençal, ajoutant à l’ambiance estivale de la pièce.
Les murs et les plafonds sont peints en couleur de la pierre teintée d’ocres naturels. Le mur couvert de silhouettes de gargoulettes en argile rappelle les vitrines bien remplies des céramistes des villages provençaux.
Projet finaliste de la design Parade de Toulon 2023, réalisé en collaboration avec la designer Clémence Valade.
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